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    Du 7 au10 janvier 2015.

    Les faits.

    Ils étaient tous là, ou presque, les journalistes de Charlie Hebdo,  le 7 janvier, comme tous les mercredis, pour la conférence de rédaction… quand deux hommes, deux frères Chérif et Saïd Kouachi cagoulés et armés de fusils d’assaut. L’un des agresseurs a dit : « Charb ? ». Il a tiré sur Charb et ils ont fait feu en rafales. Selon les propos des rescapés, ils ont crié « Allahou akbar » et « Vous allez payer, car vous avez insulté le Prophète ». Résultat 12 tués : 8 journalistes, une employée du journal, une invitée et 2 policiers

    Vendredi : parmi la quinzaine  de personnes retenues en otage dans l'épicerie casher porte de Vincennes, quatre ont été retrouvées mortes dans la supérette. Le preneur d'otages Amedy Coulibaly est aussi l'auteur de la fusillade de la veille, jeudi 8 janvier à Montrouge qui a frappé une jeune policière martiniquaise. Il connaissait l'un des frères Kouachi, les deux tueurs de Charlie Hebdo

    En ce dimanche, l'Eglise célèbre le baptême du Seigneur : il porte tout le poids du péché de l'humanité qu'il plonge dans l'eau du Jourdain et dont il va triompher sur la croix. En son corps, il a détruit le mur de la haine, rappelle St Paul. Tout meurtre me renvoie à celui des origines dans la Bible. La réponse de Caïn « Suis-je responsable de mon frère ? » nous remet devant nos propres responsabilités les uns envers les autres. Sachons les assumer, avec justesse et humanité, répond notre archiprêtre, dans l’éditorial de la feuille paroissiale.

     

    La manif du dimanche 11 janvier : un sursaut national, républicain, une bouffée d’air frais, comme un souffle d’espérance, comme une ouverture vers le ciel, une trouée, comme au baptême de Jésus que l’Eglise fête aujourd’hui. Une marée humaine contre la barbarie  titre la Croix du lundi 12 janvier : des millions de Français ont défilé hier et avant-hier dans la capitale et dans de nombreuses villes de province en hommage aux 17 victimes des terroristes, des extrémistes islamistes, pour la liberté d’expression et pour la paix. En voyant le défilé le soir du 11 je me sentais fier d’être français. Ce ui ne m’est peut-être jamais arrivé au cours de ma déjà longue vie.

    «  Paris est aujourd’hui la capitale du monde » pouvait annoncer Fr. Hollande

    Pas moins d’une cinquantaine de chefs d’État et de gouvernement étaient hier au rendez-vous et la liste des présents n’a cessé de s’allonger ces derniers jours. Après la volonté exprimée du Britannique David Cameron ou de l’Espagnol Mariano Rajoy de participer à l’événement, les grands leaders de l’Union européenne (Angela Merkel, Matteo Renzi…) ont suivi la voie les uns après les autres. Puis, comme un effet « boule de neige », on est passé de l’Europe à la planète entière. Avec même la présence de personnalités antagonistes comme le président ukrainien, Petro Porochenko, et le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov ! Ou le président palestinien Mahmoud Abbas et le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou. À noter que ce dernier avait estimé samedi qu’Israël était le «  foyer  » des Juifs de France, faisant ainsi réagir le premier ministre français Manuel Valls qui avait répliqué que «  la France, sans les Juifs de France, n’est plus la France  ».

    En ce dimanche, l'Eglise célèbre le baptême du Seigneur : il porte tout le poids du péché de l'humanité qu'il plonge dans l'eau du Jourdain et dont il va triompher sur la croix. En son corps, il a détruit le mur de la haine, rappelle St Paul. Tout meurtre me renvoie à celui des origines dans la Bible. La réponse de Caïn « Suis-je responsable de mon frère ? » nous remet devant nos propres responsabilités les uns envers les autres. Sachons les assumer, avec justesse et humanité, répond notre archiprêtre, dans l’éditorial de la feuille paroissiale.

     

     


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  • Antijudaïsme et antisémitisme (Réponse au discours de réception du cardinal Jean-Marie LustigerPar Hélène Carrère d’Encausse le 14 mars 1996 - sur Google : antijudaïsme et antisémitisme chez le card. Lustiger.

     

    Réception du cardinal Jean-Marie Lustiger

    … Qu’il me soit d’abord permis de revenir sur votre conception de ce qui unit judaïsme et christianisme. Évoquant votre conversion, vous récusez fermement l’idée selon laquelle vous auriez abandonné votre identité juive. Cela n’est pas toujours compris et pourtant, vous n’avez cessé de vous en expliquer. Comment ne pas entendre ces raisons qui éclairent toute la longue histoire judéo-chrétienne ? La relation entre les deux Testaments qui est au cœur de votre pensée donne tout son sens à l’élection du peuple juif : « Que Dieu se nomme et parle à Moïse comme à son ami, écrivez-vous, c’est le mystère déjà de l’incarnation de la Parole de Dieu qui se fait notre chair, se communique à nous, se livre à nous. Et que le Messie soit le fils éternel de Dieu fait chair est aussi une métonymie : il est Israël, non pas par substitution, mais par compréhension, ou par inclusion. Il est Celui en qui se réalise la condition filiale de la nation sainte. Jésus a observé et accompli les commandements donnés par Dieu à Moïse pour son peuplé Israël. Il a accompli sans défaillance ce qui a été demandé au juif pour vivre dans la sainteté, en vue du salut de toutes les nations, pour la Rédemption des fils d’Adam, pour rassembler et réunir tout ce que la générosité divine a répandu et prodigué dans le monde. C’est à la fois la délivrance du péché et l’accès à la vie. »

    Cette conception du christianisme, fruit d’Israël et accomplissement de la promesse qui lui fut faite par Dieu, elle est pour vous, Monsieur le Cardinal, « une vérité si tranquillement possédée » qu’elle ne nécessite ni débat ni définition. Vous rappelez volontiers le vieil adage : « Le Nouveau Testament est caché dans l’Ancien et l’Ancien se fait jour dans le Nouveau. » Vous en appelez au saint Augustin de La Cité de Dieu, aux Pères de l’Église, mais aussi à la lecture des textes que l’on doit au cardinal de Lubac. Le Christ, rappelez-vous, est né à Bethléem en Judée ; et les rois mages allant vers lui, demandaient à tous : où est le Roi des Juifs ? Le Christ n’est pas né là par hasard, dites-vous ; il ne pouvait être né ni chinois, ni enfant de l’Afrique. Le Messie n’est le Messie que parce qu’il vient du Peuple élu par Dieu. Portant en vous cette certitude si forte, il vous fallait, Monsieur le Cardinal, être chrétien, issu d’Israël et témoin de celui par qui la promesse est tenue et la prophétie accomplie. Une phrase de vous éclaire cette unité : « C’est Dieu, dites-vous, qui a fait grâce à Israël. Dieu lui a donné d’exister pour le salut de toute l’humanité, pour la venue du Règne et, selon la promesse, c’est en Israël que le Messie souffrant est déjà apparu. Jusque dans la venue en gloire du Messie, le Juif demeure et il demeure juif, qu’il soit chrétien ou non. »

    Mais à la question de la relation judaïsme-christianisme s’en mêle une autre, celle de l’antisémitisme et de ses sources. Vous avez toujours repoussé l’idée d’un antisémitisme chrétien, arguant que seul un christianisme dévoyé avait pu sombrer dans l’antijudaïsme ou dans l’antisémitisme. Vous distinguez la fidélité du christianisme au judaïsme biblique et l’infidélité des nations chrétiennes à cette tradition. C’est cette infidélité, selon vous, qui a été à l’origine des persécutions contre les juifs au cours de ce dernier millénaire. C’est elle qui a été cause des mises à l’écart, des interdictions, des baptêmes forcés, des expulsions. Mais le plus grave est à vos yeux l’antisémitisme qui se généralise en Occident dès le XVIIIe siècle. Hanté par la longue durée historique, vous considérez que l’antisémitisme et l’antijudaïsme sont les signes de la crise morale de l’Occident dont vous entrevoyez les lointaines prémices dès la Réforme, et peut-être même plus tôt encore. Mais cette crise, dites-vous, se cristallise avec la philosophie des Lumières où elle trouve sa véritable dimension. De cette crise et de l’antisémitisme qui en est le signe visible, vous citez de grands représentants : Voltaire, Diderot, Hegel. Évoquant l’antisémitisme voltairien, vous constatez que si, comme Hegel, Voltaire a hérité de la culture chrétienne, il n’est pas pour autant chrétien. L’un et l’autre ont choisi leur raison contre la fidélité à l’enseignement du Christ. Pour tant de philosophes des Lumières la pure raison rejette la Révélation dans le domaine de l’obscurantisme. C’est ce culte de la seule raison, expliquez-vous, qui est au cœur de leur intolérance à l’égard du fait juif dans sa puissance de révélation. Ce que récusent les grands esprits des Lumières c’est l’élection divine, irrationnelle, inacceptable. L’antisémitisme moderne sécrète, dites-vous, un antithéisme. Pour autant, peut-on oublier, Monsieur le Cardinal, que Voltaire mena campagne en faveur de Calas ?

    Le rationalisme est au demeurant un thème central de votre conception de la crise du monde moderne et tout particulièrement de l’Occident chrétien. La philosophie des Lumières qui divinise la raison humaine, oubliant la révélation, la foi, elle est pour vous source de toutes les tragédies morales et matérielles de notre temps. Vous rejoignez ainsi la pensée de François Mauriac dans sa belle préface à La Nuit d’Élie Wiesel. Certes, vous ne méconnaissez pas l’importance de la raison dans la maîtrise du monde et dans la capacité de l’homme à reconnaître Dieu. Mais vous en appelez à l’alliance de la raison et de la foi qui permet à la première, non de se renier, mais selon votre expression, de « se dessaisir d’elle-même pour gagner sa vérité la plus originelle ». Le lecteur superficiel de votre œuvre pourrait conclure à une simple hostilité de principe à la pensée rationaliste. Mais la vérité est que vous êtes tourmenté à la pensée des assauts que la religion chrétienne a subis tout au long de ce millénaire, et que vous espérez sauver la raison de sa suffisance. Ce que vous reprochez au rationalisme, c’est sa prétention à détenir la réponse ultime aux questions que se pose l’homme.

     


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    Profanations dans un cimetière

     

    Sarre-Union était sous le choc, dimanche, le 15 février dernier : près de 250 tombes avaient été découvertes profanées dans le cimetière juif. L’une des plus importantes profanations de cimetières jamais survenues en France. «Les auteurs ont dû procéder rangée par rangée avec des massues et frapper fort», confie l’un des deux dernières familles juives de la ville (la communauté, une des plus importantes du monde rural alsacien, comptait près de 400 membres au moment de la Seconde Guerre mondiale). Pourquoi ici ? Pourquoi des dégâts d’une telle ampleur ? C’est abominable. Qui n’est pas pris aux entrailles par de tels faits ? Sa maigre consolation serait que les actes « ne soient pas liés aux événements de janvier, mais soient plutôt le fait de jeunes désœuvrés, comme ce fut le cas en 2001 ».

    Second choc, aussi fort que le premier : la visite dans l’urgence de notre président Hollande pour rassurer les habitants et proclamer devant la nation entière que la République défendra les juifs « de toutes ses forces ». N’est-ce pas donner une publicité exagérée à un événement grave en soi, mais qui risque de produire les effets contraires à ceux que l’on souhaite ? La réponse à la question ne s’est pas fait attendre : deux jours après Sarre-Union, des dégrada- tions ont été découvertes mardi soir dans le cimetière catholique d’un village normand.

    Que faire ? Les paroles ne suffisent pas. Comment se protéger contre ces bassesses ? Mettre des policiers autour de chaque cimetière? Ce n’est pas possible ! J’en étais là dans mes questions quand je découvris un article de dans la Croix du samedi 21 février. La journaliste, Geneviève Jurgensen se posait la même question. Au cours d’une rencontre quelqu’un lui donna une amorce de réponse : N’avez-vous pas pensé au film de Charlie Chaplin, le Dictateur, lui dit cet homme, à la scène finale où l’acteur, Charlie Chaplin, un pauvre barbier juif, amnésique depuis qu’il fut victime d’un accident d’avion, se trouve confondu avec le dictateur, Hitler. Vrai sosie d’Hitler. Des milliers de personnes attendent le discours du Führer et voilà que notre sosie commence par dénoncer les méfaits d’Hitler et faire le panégyrique de la démocratie. « Je suis désolé, commence-t-il par dire, mais je ne veux pas être empereur, ce n'est pas mon affaire. Je ne veux ni conquérir, ni diriger personne. Je voudrais aider tout le monde dans la mesure du possible, juif, chrétien, païen, blanc et noir. Chacun de nous a sa place et notre terre est bien assez riche, elle peut nourrir tous les êtres humains. Nous pouvons tous avoir une vie belle et libre mais nous l'avons oublié. » Et le peuple massé sur la place de Nuremberg d’applaudir à tue-tête le discours du faux Führer… Puis vint la scène finale que Geneviève Jurgensen trouve si belle. J’ai donc cherché sur internet et j’ai trouvé la scène en traduction française. Voici les dernières paroles, un poème qu’il vaut la peine d’entendre, certain qu’il fera battre votre cœur comme il a fait battre le mien : « Tu m’entends, Hannah ? Où que tu sois, lève les yeux ! L’âme de l’homme s’est dotée d’ailes et enfin il prend son envol. Il vole vers l’arc-en-ciel, vers la lumière de l’espoir, vers l’avenir ! Vers ce lendemain glorieux qui est le tien, le mien, le nôtre à tous. Lève les yeux, Hannah, lève les yeux ! »

    Lever les yeux, se donner des ailes et donner des ailes alentour de nous, aux jeunes surtout, mais aussi aux autres, à tous, plutôt que de critiquer ou faire la leçon, donner envie de s’élever vers la lumière, vers l’arc-en-ciel, leur apprendre à rêver, à marcher vers un monde meilleur, comme nous y invite un cantique bien connu, à entendre la voix du Seigneur, à voir éclater le ciel, à communier avec l’éternel…

     


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